De quel nucléaire avons-nous besoin ?

Article paru dans la Revue de l'Electricité et de l'Electronique

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Extrait :

Un des grands déterminants de la stratégie d’une filière industrielle devrait être la disponibilité de la ressource. En l’absence de réacteurs à neutrons rapides capables de limiter la consommation de matière fissile et de la surgénérer, la limitation physique en uranium naturel disponible sur Terre interviendra assez rapidement au cours de ce siècle, mettant un terme à l’électronucléaire à des échéances plus ou moins échelonnées suivant les pays. Ainsi l’électronucléaire n’aura été qu’une étape transitoire au problème de l’énergie qui, par voie de conséquence, restera sans solution. Parler de filières d’avenir du nucléaire c’est inéluctablement cibler les RNR.

La « relance du nucléaire » telle qu’envisagée actuellement n’offre pas de réponse à cette question d’une filière durable pour le futur. Derrière le slogan on peine à discerner une stratégie nucléaire qui devrait nécessairement être au moins à l’échelle du siècle à venir.

Pourtant, la France est le seul pays d’Europe qui dispose d’un des meilleurs atouts : un stock exceptionnel de plusieurs centaines de milliers de tonnes d’uranium appauvri, qui n’est rien d’autre que de l’uranium 238. En outre, notre pays dispose déjà de la quantité de plutonium nécessaire au démarrage de 5 à 6 réacteurs de ce type.

Non seulement cette ressource stratégique assure à notre pays une souveraineté énergétique sans égale, mais elle le rend indépendant de toute importation d’uranium. Last but not least, la France a ainsi la capacité de devenir de facto un fournisseur-clé d’électricité pilotable décarbonée, offrant à l’Europe une sécurité électrique indéfectible. Encore faut-il pour cela disposer de RNR.

Enfin soulignons au regard du décideur politique que, si la première raison évidente pour disposer de RNR est la garantie de pérennité de la fourniture d’électricité, la seconde raison, plus subtile mais à forte charge éthique, est que l’utilisation jusqu’à l’épuisement de l’uranium 235 rendrait définitivement impossible tout démarrage de réacteur de fission.